Il y a quelques années un client de longue date m’a offert un livre sur le monde des galeristes Il s’agit d’un livre édité en France mais dont les principes s’appliquent tout aussi bien ici. Ayant particulièrement trouvé que la conclusion du volume résumait bien ma façon de penser, j'en partage ici avec vous ces quelques paragraphes... "Que faites-vous samedi ? Vous n’êtes pas libre ? Ah c’est vrai ! Toujours les galeries!" Combien de fois ai-je entendu cette phrase, accompagnée d’un sourire indulgent ou ironique selon l’interlocuteur. Aux amateurs qui arpentent les galeries le samedi après-midi, on demande souvent pourquoi ils se donnent cette peine : "Ne vaudrait-il pas mieux fréquenter la salle des ventes après vous être fait envoyer les catalogues ? Où aller voir directement les artistes dans leurs ateliers?" Salle des ventes, ateliers et galeries ne sont pourtant pas antinomiques et bien des collectionneurs connaissent les trois circuits. Cependant, dans les ventes aux enchères, les choses vont trop vite et être sous la menace d’un marteau qui gâche le plaisir. Dans les ateliers d’artistes, l’angoisse naît du face-à-face avec l’artiste, dont vous devenez prisonnier : il vous est difficile d’émettre un jugement critique, et même d’écouter votre intuition, vous perdez votre libre arbitre. Le galeriste fait tampon entre l’artiste et l’amateur, il assure la bonne distance, il allège. Il joue le rôle important de filtre. C’est lui qui est allé dans l’atelier choisir les œuvres, il les a sélectionnées et a réfléchi à leur présentation - encadrement et accrochage -, il est aussi un metteur en scène. Chez lui, vous pouvez prendre votre temps, critiquer, réfléchir, revoir les œuvres, discuter les prix et les conditions de paiement. Les amateurs qui imaginent faire de bonnes affaires en contournant les galeristes se trompent.
Les galeries sont un lieu pour la curiosité mais aussi pour la rencontre, la sociabilité et même la fraternité : rien ne rapproche davantage de quelqu’un que l’intérêt pour l’art, l’amour ou le rejet d’une œuvre. Elles sont agréables en toutes saisons. Par beau temps, vous y verrez quantité de jeunes gens flânant et devisant. Par temps de pluie ou de froidure, vous trouverez un accueil plus attentif de la part du galeriste et vous aurez l’impression d’être un vrai petit soldat de l’art… Les samedis, me direz-vous, sont quelquefois bien décevants : quatre heures de marche, une douzaine de galeries visitées, aucune découverte, aucun coup de cœur. La rentabilité n’est pas forcément au rendez-vous. Mais, pour autant, vous n’avez pas perdu votre temps. Il y a quelque chose d’exaltant à s’imposer une telle discipline : vous vous tenez au courant de la création, du marché, de l’air du temps, vous participez au monde contemporain. Vivement samedi ! Je vous laisse sur ces quelques mots et j’espère vous voir cette semaine ou la suivante ou quand vous aurez envie de vous offrir un moment de réflexion, de paix et de beau. Visitez les galeries en plus d’être très agréable c’est gratuit! Source : Galeristes, entretiens, d’Anne Martin-Fugier, Actes Sud 2010, p.p.283 à 285.
Photo de Pierre Séguin : Daniel Bouguerra Les commentaires sont fermés.
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AuteurChristian Gonzalez Catégories
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